Les vacances peuvent revêtir de nombreuses formes. Mais elles ont toujours ce point commun : catalyser le pire et le meilleur du quotidien. Le cinéma s’en est emparé à de nombreuses reprises pour mieux cerner leurs mille visages. De l’horreur à la naissance de l’amour, de l’évasion au burlesque, découvrez notre sélection totalement subjective de films de vacances indispensables.
Scout toujours : Moonrise Kingdom (Wes Anderson, 2012)
Chez Wes Anderson, l'été 1965 prend des airs de carte postale. Sur une île de la Nouvelle-Angleterre, un jeune scout, Sam, et une jeune fille, Suzy, profitent des vacances pour fuguer et vivre leur histoire d'amour, seuls au monde. Loin des activités estivales et des premières amours, habituellement insouciantes, les enfants agissent ici avec les plus grands sérieux et gravité face à des adultes, parents comme chefs scouts, au comportement enfantin. Si chez Rimbaud, on n’est pas sérieux quand on a 17 ans, chez Wes Anderson, on l’est quand on a 12 ans.
Le couple en vacances : Voyages en Italie (Sophie Letourneur, 2023)
Des vacances romantiques en Sicile, sans enfant, pourront-elles raviver la flamme de ce drôle de couple formé à l’écran par Philippe Katerine et Sophie Letourneur ? Inspirée par ses propres vacances en Italie avec son conjoint, la réalisatrice se met en scène dans une autofiction qui dépeint le couple en crise face aux épreuves du temps et de la routine. De l’Italie, le spectateur ne verra rien, ou presque, Letourneur s’appliquant à braquer sa caméra sur ses personnages et leurs discussions, pour filmer un voyage dont ils aimeront autant l’expérience que son récit a posteriori, comme un moyen de revivre ces vacances qui n’appartiennent finalement qu’à eux.
Les vacances en famille (de cœur) : Ama Gloria (Marie Amachoukeli, 2023)
L’été des vacances en famille, ou presque. L’été des retrouvailles entre Cléo, six ans et orpheline de mère et sa nounou Gloria, qui a dû quitter la France pour retourner au Cap-Vert auprès de sa famille. Sur place, la jeune Cléo découvre une autre culture, une autre langue, et surtout, l’autre famille de Gloria, sa “vraie” famille... Puisant dans son propre vécu, la réalisatrice Marie Amachoukeli filme cet été particulier, au cours duquel on apprend à définir les relations familiales et sa relation à l’autre, à sa famille choisie. Un récit initiatique tendre et touchant, toujours filmé à hauteur d’enfant.
L'été burlesque : Les vacances de Monsieur Hulot (Jacques Tati, 1953)
Il s’agit de la première rencontre entre le public et Monsieur Hulot, gaffeur invétéré, grain de sable savoureux dans n’importe quel rouage. C’est l’un des sommets de la carrière de Jacques Tati qui, en héritier du burlesque, soigne ses cadres comme un chirurgien son intervention. Avec cette précision d’orfèvre et ses profondeurs de champ vertigineuses, le cinéaste capture toute l’absurdité des “nouvelles” vacances d’été à travers le corps comique atypique de Monsieur Hulot dans une station balnéaire jusque-là tranquille. Un trésor intemporel.
En quête de sens : Stand by me (Rob Reiner, 1986)
Les vacances sont parfois étranges. A première vue, Stand By Me ne semble pas se situer dans l’univers de Stephen King. Mais le maître de l’épouvante n’a pas uniquement décrit les rouages du cauchemar. Il est aussi capable de brosser le portrait d’une amitié indestructible dans les fameuses petites villes perdues de la middle class américaine. Le récit de cette bande de copains paumés en quête d’un cadavre, lors d’un été charnière, aura aussi le mérite de mettre en scène un casting assez incroyable avec, en son sein, une légende qui transperce l’écran : River Phoenix.
Les vacances post-rupture : Sans Sarah rien ne va (Nicholas Stoller, 2008)
Quoi de mieux pour se changer les idées après une rupture que des vacances à Hawaï ? Mais difficile d’oublier son ex lorsque celle-ci séjourne dans le même hôtel avec son nouveau compagnon… Écrit par l’acteur Jason Segel puisant dans ses propres souvenirs de ruptures et produit par Judd Apatow, Sans Sarah rien ne va réunit tous les ingrédients de la comédie romantique, version crue et trash. Un film porté par son casting 4 étoiles (comme l’hôtel) : Jason Segel en loser traînant son chagrin sous les palmiers, secondé par Kristen Bell, Russell Brand, Mila Kunis, et une galerie de petits rôles issus de l’écurie Apatow (Jonah Hill, Paul Rudd et Bill Hader).
Les vacances initiatiques : L’été de Kikujiro (Takeshi Kitano, 1999)
Lorsque l’on voit ou revoit les films de Kitano, on est toujours bluffé d’en (re)découvrir la puissance inchangée. Ici la puissance vient de l’association impromptue du “vieil homme et l’enfant”, à savoir Kikujiro et Masao qu’a priori rien ne prédestinait à passer l’été ensemble. Mais ces vacances-là, le petit garçon s’en souviendra longtemps. A la recherche de ses origines, il trouvera comment tuer le temps en compagnie d’une figure paternelle imposée : un quiquagénaire roublard et irresponsable incarné par Kitano lui-même. Une pause estivale singulière qui deviendra le point de transition entre deux périodes de la carrière de l’acteur. Une ultime respiration, un été suspendu, avant de reprendre la course.
L'évasion impériale : Vacances Romaines (William Wyler, 1953)
Pas vraiment spécialiste de la comédie romantique, William Wyler sera pourtant le metteur en scène de l’une de ses images les plus iconiques : Audrey Hepburn sur une Vespa aux côtés de Gregory Peck. Ce ne sont pas des vacances au sens propre, puisque l’échappée belle n’aura duré qu’une seule journée. Mais ces 24 heures ont tous les atours d’une “vacance” : la fuite du quotidien avant le retour dans l’ordre cynique des choses. Condensé du charme suranné dans un noir et blanc déjà daté dans les années 1950, Vacances Romaines lorgne bien au-delà de la romance : il dresse le portrait d’une princesse éprise de liberté et déplace l’enjeu du couple vers celui du féminin.
Les vacances de l’amour : Call me by your name (Luca Guadagnino, 2017)
Lorsque James Ivory prend sa plume de scénariste, c’est pour adapter un roman à la mesure de son talent. Authentique, troublant, solaire, le film réalisé par Luca Guadagnino sera de loin le plus populaire de sa trilogie du désir (après Amore et A Bigger Splash). Certainement parce qu’il touche au plus juste, au plus près de cette émotion propre à un été suspendu dans une Italie de carte postale. L’été de toutes les tentations, l’été de la rencontre avec Oliver, l’été d’une première révélation pour Elio dans une histoire d’amour tout autant déchirante que vivante.
Les vacances de l’horreur : Midsommar (Ari Aster, 2019)
Robes blanches, couronnes de fleurs, cabanes en bois : un voyage en Suède entre amis qui débute comme un festival de rock ou une retraite chamanique et se termine comme The Wicker Man… C’est l’idée qu’Ari Aster se fait des vacances dans Midsommar, son second film après Hérédité. Le réalisateur américain plonge Florence Pugh dans un cauchemar éveillé, en plein jour, à une période où le soleil ne se couche jamais sur la campagne suédoise. Une expérience cathartique, mâtinée de folk horror autant pour le personnage que pour le spectateur.
Bonus : Falcon Lake : vacances de légende (Charlotte Le Bon, 2022)
C’est l’été pendant lequel on part avec ses parents. L’été de trop souvent. On n’est bien ni en famille ni avec ces ados plus âgés qu’on ne connaît pas encore. Mais, comme c’est le cas dans le premier film de Charlotte Le Bon, parfois, l’amour s’invite. Et là c’est une tout autre histoire. La caméra de la cinéaste adapte Bastien Vivès et filme un doux récit estival comme un conte dans un Québec lumineux.
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